Née en 1705, au sein d’une famille d’orfèvres, de peintres et de sculpteurs, Marie-Anne Loir bénéficie d’une formation de haut niveau à l’Académie de France à Rome. Dans les années 1760, elle ouvre son propre atelier et se fait rapidement connaître pour ses portraits de la noblesse provinciale. Son style, à la fois délicat et précis, révèle une maîtrise technique remarquable. À une époque où la place des femmes en art était encore à faire, elle est fréquemment éclipsée par ses frères, Alexis et Jean-Baptiste. Malgré cela, Marie-Anne Loir réussit à se forger une réputation solide. Ses œuvres, souvent réalisées sur commande, témoignent d’une grande sensibilité et d’un sens aigu de l’observation. Marie-Anne Loir ne se contentait pas de reproduire les apparences; elle cherchait à saisir l’âme de ses modèles et à révéler la complexité de leurs personnalités. Grâce aux analyses d’œuvres anonymes de cette époque et à la découverte de nouveaux portraits, nous pouvons désormais apprécier pleinement son talent et son originalité. Les recherches actuelles sur cette artiste encore méconnue du grand public permettent de mieux comprendre son parcours, de mettre en lumière son talent et de lui redonner la place qui lui revient dans l’histoire de l’art.

Ce tableau est un merveilleux exemple de l’évolution constante des connaissances en histoire de l’art. Longtemps classé comme exécuté par un artiste anonyme, ce n’est qu’en 2022, que Julie Anne Sadie Goode, chercheuse en histoire américano-britannique, émet l’hypothèse que ce tableau soit de la peintre française Marie-Anne Loir. Les femmes ayant été peu reconnues et les œuvres issues de la Nouvelle-France souvent mal identifiées, cette découverte est d’une grande richesse.

Il s’agit du portrait de Gaspard-Joseph Chaussegros de Léry fils, ingénieur en chef du roi et propriétaire de plusieurs seigneuries. Durant ses quarante ans de carrière, il érige ou consolide de nombreux ouvrages défensifs partout sur le territoire. Chaussegros de Léry fils est, à l’instar de son père, une figure importante de la Nouvelle-France. À cette époque, les portraits sont réservés aux mieux nantis et aux hauts placés de la société.

On présente les nobles dans leurs plus beaux vêtements, parés de bijoux et d’accessoires somptueux. Ici, l’homme porte un veston de velours rouge bordé de fourrure, par-dessus son plastron militaire. Ce tableau l’immortalise comme faisant partie de la noblesse de l’époque, allant jusqu’à mettre en valeur sa médaille, possiblement l’ordre royal et militaire de Saint-Louis, une récompense instituée par le roi Louis XIV destiné aux militaires de l’armée française.